17 Septembre 2014
« - Pourquoi es-tu si con ? Les mots étaient sortis avant que je puisse y réfléchir à deux fois.
- Tout le monde doit exceller quelque part, non ?
- Eh bien, tu fais vraiment du bon boulot.»
Dee haussa les épaules et alla chercher un râteau. Elle me faisait rire avec sa jupe
et ses sandales à talons compensés. D’après elle, c’était le summum de la haute couture. Elle tira l’outil vers moi.
— En tout cas, je m’amuse bien.
— Plus que si tu avais fait du shopping ? lui demandai-je d’un air taquin.
Elle sembla réfléchir sérieusement à la question, le nez froncé.
— Oui. C’est plus… relaxant.
— C’est vrai. Quand je fais ce genre de choses, je ne pense plus à rien d’autre.
— C’est ce qui me plaît. (Elle se mit à étendre le terreau.) Tu jardines pour éviter de
trop réfléchir ?
Je m’assis pour ouvrir un autre sac de terreau. Je ne savais pas comment répondre
à cette question.
— Mon père… il adorait travailler la terre. Il avait la main verte. Dans notre ancien
appartement, nous n’avions pas de jardin, seulement un balcon, et pourtant nous y
avons créé un jardin ensemble.
— C’est ce que tu fais quand tu as du temps libre ? me demanda-t-il sans prêter attention à ce que disait sa sœur.
— Pardon ? Tu as décidé de me parler, maintenant ?
Avec un sourire forcé, j’attrapai une poignée de terreau et la jetai par terre. J’aplanis le tout et recommençai.
— Oui. On peut appeler ça un hobby. C’est quoi, le tien ? Martyriser les bébés chiens ?
— Je ne suis pas sûr de pouvoir le révéler devant ma sœur, rétorqua-t-il avec un regard de tombeur.
— Je ne veux pas le savoir ! s’exclama Dee en grimaçant.
Les images qui me traversèrent l’esprit auraient été interdites aux moins de dix-huit ans. Et à son expression, il était clair qu’il le savait. J’attrapai une poignée de terreau.
— C’est moins ennuyeux que ça, ajouta-t-il.
— Je crois qu’on s’est bien débrouillées.
— Oui.
Elle poussa de nouveau son frère en direction de leur maison. Il ne bougea pas d’un
millimètre.
— Ennuyeux ou pas, on a fait du bon boulot. Alors, tu sais quoi ? Ça me plaît d’être
ennuyeuse.
Daemon examina les fleurs fraîchement plantées comme s’il les disséquait pour une
expérience scientifique.
— Et je crois qu’il faut que j’étende cet ennui jusqu’au parterre devant chez nous,
poursuivit-elle, avec une lueur enthousiaste dans les prunelles. On pourrait retourner au
magasin pour acheter du matériel et tu…
— Elle n’est pas la bienvenue chez nous, intervint Daemon d’une voix cassante en se
tournant vers sa sœur. Je ne rigole pas.
Surprise par le venin qui transparaissait dans ses paroles, j’eus un pas de recul.
Dee, en revanche, tint sa position, les poings serrés.
— Je parlais de s’occuper du massif de fleurs qui est devant la maison, pas dedans.
Du moins, la dernière fois que j’ai vérifié.
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The Teapot Library 28/06/2019 08:39
La couleur des mots 19/04/2017 18:30
Carole94p 19/04/2017 19:16
Rebecca G. 27/10/2015 11:36
Carole94p 27/10/2015 17:33